"La flamme, je la porterai pour toutes les personnes en situation de handicap"

Téléphone portable en main, se commandant une boisson chaude avec un parfait naturel, Charline apparaît comme n’importe quelle cliente dans ce petit café de village. Un seul indice laisse deviner sa surdité, Charline fixe les lèvres lors des échanges. Un handicap invisible, qu’elle a appris à accepter, grâce notamment au sport.

Faire face à la solitude

"Depuis toute petite, j’ai été malgré moi isolée. Ma surdité a été découverte tardivement, mes problèmes d’audition étaient mis sur le compte d’otites. Je rencontrais des difficultés en classe, qui ont été mises par mon professeur sur le compte d’un hypothétique autisme… Ajoutez à cela mes origines coréennes qui me démarquaient dans le petit village où j’ai grandi auprès de ma famille d’adoption… Tous les ingrédients étaient réunis pour complexifier ma prise de contact avec l’autre. Une fois mon handicap détecté, c’est devenu un sujet tabou, il fallait cacher l’enfant différente."

Charline ne se décourage pas et grandit avec le souhait de s’intégrer. "Je voulais pratiquer une activité sportive. Mais je me suis confrontée à une discrimination au sein même des personnes sourdes, avec une distinction qui s’opère entre les personnes sourdes de naissance ou non. Cette coupure du monde m’a pesée. Une fois devenue mère, j’ai continué à évoluer dans un cercle social limité, rythmé par mes rendez-vous à l’hôpital et le quotidien de ma fille."

Le tennis : 1ère marche vers l’acceptation

Un jour, voyant sa fille pratiquer le tennis avec son père, Charline passe le pas. "J’avais envie de partager des moments avec eux." Rapidement, elle se prend au jeu. "J’étais entraînée par Brice Battistini, il a été d’une immense patience et bienveillance, j’avais envie de lui prouver qu’il avait bien fait de s’investir à mes côtés. J’ai commencé les tournois contre des personnes valides, en me fixant l’objectif de monter à 30 (système de classement de la discipline)." Les victoires s’enchaînent, Charline atteint en un an son objectif et devient vice-championne du Bas-Rhin.

"Avant chaque match, je préviens mes adversaires et l’arbitre et je demande une annonce des points par des signes des mains. Les joueurs ne comprennent pas toujours en quoi la surdité handicape : la gestion de l’équilibre n’est pas la même, mais surtout, on ne peut pas anticiper la puissance de la balle ! Mais j’aime rappeler qu’il y a aussi des avantages, comme le fait de ne pas être dérangée."

Un jour, à une remise de médailles, Charline interpelle le président du Comité départemental du Bas-Rhin, Pascal Hladnik, sur la place des personnes en situation de handicap dans le tennis. Au fil des échanges, sensibilisé au sujet, il la nomme présidente de la Commission santé et handicap. "Je me suis retrouvée propulsée à un poste ambitieux, où tout était à construire. Suite à cette nomination j'ai mis "mon tennis" de côté afin d’ouvrir des sections de tennis handicap dans des clubs bas-rhinois : tennis-fauteuil, tennis fauteuil-électrique, tennis-sourd et malentendant, tennis adapté et enfin ceci-tennis."

Faire briller les jeux Paralympiques

"En novembre dernier, le service des sports de la Collectivité européenne d’Alsace m’a contactée pour me proposer de la représenter lors du passage de la flamme paralympique le 25 août. Je n’y croyais pas ! J’étais émue, fière, c’était intense ! Ça n’arrive qu’une fois dans une vie. Porter la flamme, c’est représenter toutes les personnes handicapées, ce n’est pas juste moi ! Les Jeux Paralympiques, c’est un moment de sport exceptionnel. L’occasion de découvrir des disciplines incroyables comme la boccia (sport à destination des personnes déficientes visuelles, qui s'apparente à la pétanque), le cécifoot, le handibasket… C’est aussi l’occasion de mettre en lumière nos nombreux athlètes handi qui ramènent des médailles et qui sont si peu valorisés." Et si vous vous laissiez tenter ? France Télévisions diffusera l’ensemble des Jeux Paralympiques du 28 août au 8 septembre 2024.